Bassin du Diable, Zoura et la fleur maléfique.

Bassin du Diable, Zoura et la fleur maléfique

La légende du Bassin Du Diable est extraite de l'Album de La Réunion. Texte d'Isabelle Hoarau, publié dans Contes et légendes de l'île de la Réunion.


Le bassin du Diable est situé à environ 500 mètres d'altitude dans le lit du Grand Bras, un affluent de la rivière Saint-Denis, le bassin du Diable relève du territoire de la commune de Saint-Denis de La Réunion. On le trouve à peu de distance à l'ouest du centre du village du Brûlé, dans les Hauts de cette commune.

Légende du Bassin Du Diable.

Il y a bien longtemps déjà, dans les hauts du village du Brûlé vivait une famille. Ils habitaient une case un peu à l'écart des autres dans un bonheur sans nuage. Combo et Nariana, tels étaient leurs noms, s'aimaient depuis des années. Toutefois, leur amour n'avait pas porté de fruits. Aucun enfant n'était venu couronner leur bonheur. Nariana en concevait du chagrin et adressait constamment des prières vers le ciel d'une manière fervente. Hélas ! Celui-ci restait sourd à ses supplications.

Enfin, un matin, elle s'aperçut que ses souhaits allaient être exaucés. Quand elle fut certaine de ce fait, elle annonça la nouvelle à Combo en se jetant dans ses bras. Ils remercièrent Dieu de cette faveur inespérée. Le jour tant désiré arriva enfin ! Nariana mit au monde une fille qui reçut le doux nom de Zoura. Tout le village fut en fête. La sympathie et l'affection que tous les habitants éprouvaient pour eux, à cause de leur dévouement et de leur bonté pour tous, éclatèrent dans ce moment.

Chacun prit part à la joie des deux époux. Zoura dès sa naissance fut entourée des soins assidus de sa mère. Elle veillait constamment sur elle avec une sollicitude exagérée. Elle ne pensait, ne vivait plus que pour son enfant. L'enfant grandit rapidement. A mesure qu'avançait son âge, ses traits se développaient, annonçant une beauté rare. Avec ses yeux noirs et brillants, sa figure à l'ovale parfait qu'encadrait une longue chevelure noire, elle provoquait déjà l'admiration de tous ceux qui la voyaient. Tout le monde la cajolait, la flattait, sa mère ne voulait pas qu'elle éprouvât la moindre contrariété et ses moindres caprices étaient aussitôt satisfaits.

Zoura, qui devenait de plus en plus belle eut bientôt un caractère gâté, elle devint méprisante, exigeante et orgueilleuse. Elle devint insupportable si bien qu'on commença à ressentir de la froideur à son égard. De jours en jours, elle vit diminuer les soins et complaisances que l'on avait pour elle ; elle s'en irrita et accabla de son mépris tous ceux qui ne lui plaisaient pas. Sa mère voyait avec peine les défauts envahir le cœur de sa fille, mais il était trop tard. Combo était déjà désespéré, plusieurs fois il avait voulu intervenir, mais plein d'amour pour sa femme, il n'osait pas la contrarier et faire des remontrances à Zoura qu'elle idolâtrait.

Peu à peu, tout le monde s'éloigna d'elle ; se voyant mise à l'écart, elle devint méchante et cruelle. Elle se vengea sur ses parents qu'elle rendait malheureux à tout moment et fut leur tourment quotidien. Elle avait à peine dix-sept ans qu'elle était hautaine, vaniteuse, cruelle et égoïste, tous ces défauts contrastaient avec l'éclat de sa beauté qui faisait dire que c'était un monstre caché sous une figure céleste. Une dernière espérance restait à Nariana, sa fille arrivait à l'âge où le cœur s'épanouit sous l'amour, comme une fleur chargée de rosée s'entrouvre aux doux rayons du soleil, épurée et vivifiée par des sentiments généreux qui s'éveillent dans le cœur des amoureux.

Elle pensait que cela ramènerait Zoura dans le droit chemin. ZOURA venait d'atteindre sa dix-huitième année et jamais sa beauté n'avait été plus éclatante. Se mirant souvent dans l'onde des ravines, celle ci était devenue amoureuse de se propre image. Dans une de ses promenades solitaires, elle arriva auprès d'un précipice ; de forme circulaire, ses bords s'arrondissaient en entonnoir et ses flancs étaient garnis de lianes et d'arbustes revêtant les rideaux d'un rideau verdoyant. Une fleur d'un rouge ardent se trouvant sur des pentes les plus inclinées attira son attention ; brillant d'un vif éclat, elle ressemblait à une tâche de sang sur un beau tapis vert.

Zoura n'eut plus qu'une idée en idée : posséder cette fleur. Une pensée infernale traversa alors son esprit : bien souvent elle avait entendu les grandes marques d'admiration des gens du village ou de passage. Elle prit donc la résolution de s'assurer de l'influence qu'elle pouvait exercer, et se proposa d'ordonner au premier qui lui déclarerait son amour, d'aller chercher la fleur rouge qu'elle convoitait, quel que soit le danger mortel qu'il courrait. Peu de jours après le village fut en fête ; pour assurer son triomphe, Zoura se para avec le plus grand soin. Son arrivée produisit la plus grande sensation.

Un murmure général d'admiration s'éleva, qu'elle accueillit avec un sourire de dédain. Elle fût bientôt entourée, vantée et adulée. Presque tous les jeunes gens mendiaient son regard, délaissant les autres jeunes filles. C'était à qui redoublait d'attentions pour capter son intérêt. Elle demanda à ceux qui l'entouraient qui voulait être son cavalier : tous s'offrirent. Elle choisit un des plus jeune et empressés auprès d'elle. D'abord intimidé, le jeune homme n'osait parler.

Mais Zoura l'encouragea et acheva de le subjuguer par un sourire dont elle avait le secret, si bien qu'il finit par lui exposer toute sa passion. Celle-ci lui répondit en lui disant d'un air glacial qu'elle doutait de la sincérité de ses paroles. L'infortuné fit de grands serments, la suppliant de le mettre à l'épreuve. Alors Zoura l'emmena loin du village, et après avoir marché quelques temps dans la campagne, ils arrivèrent au bord du précipice. D'un geste, elle lui montra la fleur rouge que le soleil faisait étinceler et le lui dit simplement :

" Je la veux ! "
" Mais ce que vous me demandez est impossible, répondit le jeune homme, vous voulez m'envoyer à la mort ! "
" Vous m'avez dit de vous mettre à l'épreuve, je vous demande une seule chose et vous refusez. Et vous osez me dire que vous m'aimez ! "

Sa réponse acheva de troubler le malheureux, un seul sourire de celle ci le ramena à l'obéissance; séduit, dompté, fasciné il obéit et se mit en devoir d'effectuer la périlleuse entreprise. Avec des peines inouïes, il arriva près de la fleur, et tout à coup il mesura le danger, il s'aperçut de l'abîme qui s'ouvrait sous ses pieds. Il se cramponna aux lianes, sentant qu'il ne pourrait aller plus loin. Pourtant la fleur n'était qu'à quelques pas, il lui semblait n'avoir qu'à allonger le bras pour la saisir. Ne pouvant y parvenir, il se retourna vers la jeune fille, espérant qu'elle lui donnerait la permission de revenir sur ses pas, satisfaite de l'épreuve.

Mais à ce moment là, une lueur sinistre brillait dans les yeux de Zoura. Il eut peur, le vertige le prît et il roula au fond du précipice. Après ce funeste accident, Zoura retourna tranquillement chez elle et s'endormit le soir sans le moindre remords. Le lendemain tout le village fut en émoi de la disparition du jeune homme. On savait qu'il était parti avec elle, mais personne ne l'avait vu revenir. On prit des informations près de la jeune fille, celle ci raconta calmement l'événement. Cette horrible sang-froid fit éprouver un sentiment de répulsion à son égard.

Ses parent même eurent du mal à ne pas s'éloigner d'elle. Malgré cette aventure, elle continua ses manœuvres de coquetterie. Maints garçons subirent son ascendant. Tels des papillons, ils allaient se brûler au feu de Zoura. Un garçon du village mourut d'amour pour elle, ce qui la laissa tout à fait insensible, malgré la douleur de sa mère qui faisait peine à voir. La haine publique éclata alors. Les habitants du village étaient si indignés qu'ils parlaient de se réunir pour la chasser de ces lieux qu'elle emplissait de désolation, lorsque arriva dans le village un étranger.

Nul ne le connaissait, ni ne savait d'où il venait. Il était jeune, beau, gracieux et séduisant. Toutefois, près de lui on ressentait un certain malaise sans en comprendre l'origine. Sa figure était blanche comme de l'ivoire, ses yeux avaient un éclat fulgurant qu'on avait de la peine à soutenir. Tous avaient hâte de s'éloigner de lui, tant sa présence oppressait. Dès son arrivée il entendit tous les malédictions dont on accablait Zoura. Il pria alors un des habitants de lui montrer la jeune fille. Tous voulurent le détourner de ce désir, le prévenant du malheur qui l'attendait.

Mais il n'écouta rien et se présenta devant Zoura. A sa vue, celle ci rougît, pâlit, balbutia, troublée par le regard étrange. Elle essaya de résister en vain, puis courba bientôt la tête. Elle avait enfin trouvée son maître. Enfin elle aimait ! Cet amour l'embrasa comme un feu, la consumant dans son haleine brûlante. Elle qui avait été insensible et froide, ne se posséda plus et ressentit bientôt les tourments que les autres avaient éprouvés pour elle. Les jours s'écoulaient et Zoura aimait de plus en plus l'étranger. Malgré ses nombreuses questions sur ses parents, son pays, elle ne savait toujours rien. Une nuit elle fit un rêve effroyable.

Elle se voyait emportée par le jeune homme dans les profondeurs de l'abîme. Et tout à coup, elle voyait les victimes s'avancer vers elle. Elle essayait de fuir, mais en vain. Chacun lui reprochait ses souffrances et redoublait ses tourments. Car le remords avait commencé à l'envahir. Elle vit en dernier lieu son père et sa mère mourir de chagrin. Au lever du jour on entendit une voix s'écrier : Que tout le monde se rende au précipice ! Chacun fut épouvanté par cet ordre, on crut à un avis du ciel. On se rendit en foule à l'endroit indiqué, à peine les habitants étaient ils installés qu'ils virent arriver Zoura au bras de l'inconnu. Arrivé au bord du gouffre, l'inconnu lui dit en montrant la fleur rouge cause de tant de malheurs : " Vous avez juré d'appartenir à celui qui vous apporterait cette fleur. Dans un instant vous la posséderez. "

Il descendit la pente du précipice sans le moindre effort. Il cueillit la fleur qui brillait toujours d'un vif éclat et vint l'offrir à Zoura. A peine celle-ci l'eut prise que des gouttes de sang perlèrent entre ses doigts. L'étranger dit alors d'une voix forte :

" Tout le village est témoin que je vous ai donné la fleur que vous désiriez ; vous m'appartenez maintenant ! Il est temps de punir vos fautes ! C'est ici qu'a eu lieu le mal, c'est ici qu'aura lieu le châtiment. Regardez moi ! "

Une transformation complète en lieu en lui.

" Le diable ! " s'écria Zoura épouvantée.

" Oui pour vous je suis le diable, mais pour l'humanité je suis la justice. Vos tourments ne cesseront que lorsque par la souffrance vous aurez expiés vos crimes. "

On vit alors l'inconnu entraîner Zoura au fond du gouffre, le fond bouillonna. Tous les habitants s'en retournèrent émus et effrayés par un tel spectacle. Le gouffre se remplit alors d'eau et un bassin se forma. C'est depuis ce temps là qu'il porte le nom de " Bassin du Diable ".



Liens commerciaux

Haut de page


Liens commerciaux.


Dernière mise à jour : Samedi 20 Avril 2024   Webmaster. Tous droits réservés © 2002 / 2024

Conformément à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données à caractère personnel qui vous concernent en nous contactant en cliquant ici

Liens commerciaux.

Booking.com




Annuaire La Réunion

Hotel La Réunion.

Gîte La Réunion.

Location voiture La Réunion.

Immobilier La Réunion.

Musée La Réunion.

Canyoning La Réunion.

Plongée La Réunion.

Loisir activité La Réunion.

Parapente La Réunion.